Nous observons le sol tel
un tapis de braises qui a survécu à la nuit. Ça scintille, ça
rougeoie. Des colonnes de fourmis s'agitent, les jaunes croisent les
rouges dans un ballet incessant. Il est 22h00, depuis une vingtaine
de minutes déjà, nous survolons la super mégalopole de Mexico. Le
commandant annonce l’atterrissage imminent. Nous y voilà.
Sur un petit papier, au
fond d'une poche, figure l'adresse de nos hôtes : rue Bruno
Travern, Coyoacan. Sans carte, de nuit et chargés comme des mules,
nous hésitons à prendre le métro (pas de soucis nous aurons bien
l'occasion de l'expérimenter plus tard). Nous optons pour un voyage
en taxi, l'occasion de voir les premières coccinelles et les
premiers bouchons de la ville. Après une heure de trajet, le
chauffeur nous dépose devant une superbe résidence, les gardiens
nous ouvrent le portail, on nous attendait. Au troisième étage,
Francisco, Melba et leur petite fille Luciana nous accueillent
chaleureusement. Francisco parle couramment Anglais et Français,
mais en bon prof, c'est bien en Espagnol que nous conversons autour
d'un succulent repas. Nos nouveaux amis sont d'heureux nouveaux
propriétaires d'un très bel appartement. En outre amateurs d'art,
ils l'ont décoré avec goût dans le style Huichol. Nous avons notre
chambre et salle de bain privée, dans la cour, une piscine chauffée,
on n'en demandait pas tant. Nous passons notre première semaine
Mexicaine chez eux.
A deux pâtés de maison, se trouve la maison de
la célèbre artiste Frida Kahlo, une icône de son pays. Un peu plus
loin le marché du quartier, animé. En continuant, le Zocalo (la
place centrale) organisée autour de son église baroque et de
gigantesques statues de coyotes, emblême de la ville. Coyoacan est
attrayante. Nous sommes qui plus est arrivés au moment d'une des
fêtes les plus populaires du Mexique : El dia de muertos. Fête
religieuse correspondant à notre Toussaint mais en beaucoup plus
« festive » et haute en couleurs. La Catrina, sorte de
grande dame à chapeau cadavérique, est une des figures familières
de la fête. Si l'on ajoute à cela l'influence Américaine avec
Halloween, les rues de Coyoacan sont hantées, pendant près d'une
semaine, de zombies pas bien méchants âgés de 7 à 77 ans.
Nous changeons de
quartier et nous dirigeons vers Xochimilco. Ville vestige de ce à
quoi ressemblait Mexico à l'époque des Aztèques. En effet, avant
l'arrivée des conquistadors, la citée était bâtie au milieu d'un
lac, entourée de jardins flottants. C'est ce qui subsiste à
Xochimilco, où les trajineras (barques) n'ont pas encore cédé le
pas aux voitures. Ailleurs, les marécages ont été comblés pour
faire place aux constructions espagnoles. Hélas, la nature reprend
toujours ses droits et le sol spongieux fait s'enfoncer les édifices
les plus lourds, en témoigne l'imposante cathédrale qui prend des
airs de tour de Pise.
Déjà une semaine de
passée, nous avons pris la température de la ville, il est
maintenant grand temps de se consacrer à notre mission première :
trouver des vélos. Ainsi commence notre petite routine Mexicaine :
Metro-Vélo-Taco(s). Qui durera tout de même près de trois
semaines...
Le métro...
12 lignes, 195 stations,
aux quatre coins de cette ville immense. Avec un prix dérisoire (30
centimes le ticket), c'est un moyen de transport très populaire.
Pendant le rush hour (tardif, les Mexicains ne sont pas des
lèves-tôt), c'est à croire que toute la ville s'invite en
souterrain. Malgré la cohue, les gens sont très aimables. Ça
discute, ça débat et ça se galoche. Les longs trajets sont rythmés
par les allers et venus des vendeurs à la sauvette qui aguichent le
client du même refrain chantant : « cinco pesos te vale,
cinco pesos te cuesta ». Une vraie économie parallèle, on
trouve de tout : des écouteurs, des coupe-ongles, des machines
à bulles, des chewing-gums, des cds, des vitamines. Mais aussi des
livres de droits constitutionnels, des bas de contention ou bien la
classification des éléments chimiques. Ça peut toujours servir !
Le plus drôle, c'est que les gens achètent.
Les vélos...
Suivant les conseils
d'amis cyclo-randonneurs, nous avions une idée assez précise sur le
type de montures dont nous avions besoin. Après avoir parcouru de
long en large la ville pendant plusieurs jours et écumé les
magasins de deux roues, il a fallu nous rendre à l'évidence :
nous ne trouverons pas les vélos de nos rêves. A croire que nous
sommes les seuls cyclo-randonneurs à avoir eu cette idée farfelue
de démarrer notre aventure dans cette ville. Les seuls vélos
adaptés au voyage que l'on trouve sont importés, et de ce fait, non
seulement rares, mais très chers. Idem pour les sacoches et
l'équipement de camping dont nous avons besoin. A l'inverse, il y a
des dizaines de magasins qui proposent des marques locales très bons
marchés, mais rien n'indique que les bicyclettes nous emmèneront
plus loin que le périphérique. Pour les budgets intermédiaires :
pas grand chose !Finalement, presque par hasard, nous tombons
sur cette échoppe de la rue Coahuila. Un collectif de mi-artiste/
mi-bricolo s'y est installé et propose des vélos sur mesure,
personnalisés selon le goût et les exigences du client. Cette
option nous tente. Seul hic, il nous faut attendre. Entre les pauses
cafés et les jours de congés, il faudra dix jours à nos loulous
pour nous fournir nos bicyclettes.
Les tacos...
Nous avons le temps. De
flâner, de visiter les différents quartiers, les musées, mais
surtout... de découvrir la gastronomie Mexicaine qui nous fait envie
depuis plusieurs mois déjà. A Mexico, l'incontournable, c'est le
taco ! De toute les tailles, pour tous les goûts, à tous les
coins de rues, c'est une institution qui mérite bien un article à
part. A suivre.
Bien que la ville nous
plaise beaucoup, nous éprouvons le besoin de changer d'air. Sur une
journée, nous partons en escapade pour Teotihuacan, site
archéologique grandiose. Fondée vers -200 avant JC, la citée a
connu son apogée au début de notre ère. On pense qu'elle était la
plus grande ville d'Amérique à cette époque. Comme beaucoup de
civilisation précolombienne, l'effondrement du peuple Teotihuacanos
a été soudain. Il pourrait être dû à des guerres internes, des
envahisseurs, des périodes de sécheresse, des maladies. Autant
d'hypothèses qui restent à confirmer.
Cette visite attise notre
curiosité. Au musée d’anthropologie de Mexico, nous comblons
notre ignorance sur le sujet. Désormais, dans nos petites têtes,
Aztèques, Mayas et Incas ne sont plus à mettre dans le même sac.
Nous pouvons leur attribuer un territoire, une époque et une
histoire singulière et extraordinaire. De plus ces trois
civilisations populaires du grand public sont loin d'être les
seules dans l'Amérique pré-colombienne (et d'aujourd'hui).
Immanquablement,
s'intéresser à cette histoire nous amène à celle des
conquistadors, au premier rang desquels figure Hernan Cortes. La
confrontation de ces deux mondes aboutit à des horreurs mais aussi à
des échanges colossaux dont nous oublions parfois la portée. En
effet, en arrivant au Mexique, Cortes et les Espagnols ont eu une
conception particulière du troc : donne moi tes pommes de
terre, je te donnerai la rougeole ; donne moi tes tomates, je te
ferai bon chrétien ; donne moi tes glouglous, je te donnerai
un cochon envahisseur... Aujourd'hui que serait un tacos sans
cochonnaille et que serait la gastronomie Française sans patate ?
Nous faisons également
une excursion culturelle dans la belle ville de Guanajuato aux
charmes multiples. Ancienne citée minière, elle est percée tel un
gruyère. Le centre ville, lui, est animé et très coloré. Grâce à
son université et à ses nombreux musées, Guanajuato jouit d'une
ouverture culturelle particulière. C'est également la ville de
Diego Riviera, l'époux de Frida et l'artiste peintre Mexicain le
plus connu de son pays.
Nous retournons à
« Déèfé » (DF pour Distrito Federal) comme les locaux
nomment Mexico. C'est Miguel qui nous accueille dans le quartier de
Camarones (crevettes!). Le ton est donné dès notre arrivée. En
compagnie de Claire, Canadienne, Ahn, Coréenne et Andoni, Mexicain,
nous partons pour une folle nuit. Première étape, le stade, pour un
match de « Lucha Libre » qui n'est autre que du catch !
Des muscles, du show, des bimbos et de la bière : les Mexicains
en raffolent. Dans un dernier combat épique, sous les hourras du
public, Cavernario terrasse Blue Demon en lui lançant à la face
deux nains déguisés en torpille. No comment ! La soirée se
poursuit à La Roma, le quartier hipster de la ville. Nous découvrons
dans un club branché le concept étrange de Hi-NRG music, sur
laquelle on danse tout seul en faisant n'importe quoi (on a toujours
pas compris)! Avec ses 20 millions d'habitants, il y en a forcément
pour tous les goûts à Mexico...
Enfin arrive le jour tant
attendu, nos vélos sont prêts, ou presque... en fait pas du tout.
Nous arrivons au magasin où seuls nos cadres sont peints. Les roues,
le pédalier, les porte-bagages traînent aux quatre coins du
bouiboui. « Pas de panique, allez prendre un café dans une
heure se sera prêt ! ». Le « ahorita »
(traduisez par 'tout de suite') est en effet un concept très
Mexicain : unité de temps allant de trois minutes à trois
jours. Un poil énervés, nous faisons le pied de grue devant le
magasin toute la journée. Les mécanos s'affairent et les pièces
sont achetées dans l'urgence, à la nuit tombée ils sont enfin
prêts, le résultat est esthétique.
Le 19 novembre au petit
matin, tout excités, nous prenons la route. Soixante-dix kilomètres
de route éprouvante pour sortir de la mégalopole nous mènent à la
charmante bourgade d'Amecameca. Le lendemain, escale technique, ça
commence bien ! Problème de roue arrière pour Gautier.
Finalement, ce repos forcé est salutaire pour nos fessiers meurtris.
L'étape qui suit, est
qui plus est de haut niveau : 70 kilomètres encore mais un col
à 3700 mètres et une descente dans les cailloux. Allez Gérard
Fanion ! Il nous faudra onze heures pour la couvrir.
Au sommet du Paso de
Cortes, entre les deux célèbres volcans Popocatepetl et
Itzaccihuatl, nous essuyons un orage de grêle, la vue est bouchée.
Nous nous étions promis des étapes simples et courtes pour
démarrer, ah les cons !
C'est harassés de
fatigue et affamés que nous arrivons dans la belle ville de Cholula.
C'est dans cette ville sainte que nous rencontrons Ana et Joël, nos
sauveurs. Joël nous recueille dans un piteux état au Zocalo de la
ville et nous guide vers le restaurant qu'il gère. Il nous offre,
sans conditions, bières fraîches et pizzas succulentes. Arrivés
chez eux, après une douche brûlante, les amoureux nous laissent
leur lit douillet. Nous nous écroulons, il est 20h00. Merci
couchsurfing !
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Justine et Catrina |
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Ouistiti! |
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Dia de muertos au Zocalo |
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avec Francisco, Melba et Banana! |
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Couchsurfing a du bon! |
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Du vert à Mexico! |
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Parmi les jardins flottants à Xochimilco |
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Marché organisé! |
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Tout est bon dans le cactus |
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Amis cyclistes à la parade |
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Mario aux tacos! |
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Miguel et compagnie! |
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Cavernario, roi du ring! |
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A l'assaut de la pyramide du soleil |
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Coucher de soleil sur la pyramide de la lune |
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Fabricant de tortillas |
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Vendeuse de maïs |
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Pas pour les végétariens |
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Zocalo de Guanajuato |
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Chien fifou |
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Guanajuato la colorée |
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Cygnature de portes |
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Colorée on vous dit |
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Jusque dans la baignoire |
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Danseuse de rue |
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C'est presque prêt! |
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Gogo et ses jouets |
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Merci à Toto et au Rueda Libre Crew |
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Amecameca |
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Allez Gérard Fanion! |
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Premier exploit! |
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Une des nombreuses églises de Cholula |
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Toujours sous le soleil |
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Avec Ana et Joël |