Sur la route...

dimanche 7 septembre 2014

L'appel de la forêt

Notre escapade de quelques jours dans la péninsule de Kenai avait aussi valeur de test. Réussi ! Nous sommes fin prêts, équipés pour traverser le continent et confiants envers notre van (surnommé Yakari) qui nous a montré une furieuse envie d'avaler les kilomètres.

C'est ainsi que le 17 août, nous larguons les amarres. Aurevoir Anchorage, notre port d'attache, où nous avons caboté près de quinze jours. Aurevoir Chris, notre nouvel ami qui nous aura tant offert.
Nous ferons les premiers kilomètres avec lui, jusqu'au glacier Matanuska. Une journée à escalader ce géant bleu, en guise d'adieu.

Puis nous mettons le cap au nord. Malgré notre émerveillement, nous n'avions fait, jusqu'ici, qu'effleurer l’immensité de l'Alaska sauvage. Notre arrivée au Parc Denali nous plonge dans une autre dimension.
De la toundra à perte de vue, magnifiée par les couleurs d'automne qui déjà s'invitent. Des rivières glacées qui serpentent dans des lits trop grands à cette saison. Et au loin, quand le vent veut bien chasser les nuages, des glaciers par dizaines et le majestueux Mont Mac Kinley, point culminant de l'Amérique du nord. 
Au milieu de ce tableau, un chemin, un seul. Nous l'emprunterons sur quelques dizaines de kilomètres jusqu'à un lieu dit au nom chantant : Igloo creek. Nous en ferons le point de départ d'une marche de trois jours, en autonomie. Le Parc Denali a ceci de particulier qu'il ne possède aucun sentier de randonnée. Le parc délivre des permis en nombre limité aux marcheurs souhaitant s'y aventurer, une centaine par jour pour un territoire grand comme la Belgique. Munis d'une carte au 1/25.000, de notre tente flambant neuve, d'un « bear can » pour nos vivres et des conseils avisés des rangers, nous partons tout sourire « into the wild ». 
Bien vite, nous nous rendons compte que la balade ne va pas être de tout repos, le terrain est beaucoup moins hospitalier qu'il n'en a l'air. Entre forêt dense, buissons de myrtilles, tapis de mousse de trente centimètres, marécages et torrents à traverser, notre progression est très lente. Le plus efficace se révélera de suivre les sentiers de passage d'animaux, non sans une certaine appréhension. Mais au final nous ne verrons ni ours, ni loups, ni autre grand mammifère. Peut être avons nous trop bien appliqué les conseils des rangers en frappant des mains et chantant à tue-tête à chacun de nos pas.
Malgré la difficulté de la marche et les nuits très froides et humides, nous garderons un souvenir fort de ces trois jours en pleine nature. Quelle récompense en fin de journée lorsque nous montons la tente en haut d'un escarpement rocheux. Très vraisemblablement, aucun homme n'a jamais foulé cet emplacement. Partout où la vue porte, c'est la nature sauvage et le silence.
Ayant rejoins la route principale, nous hélons un bus de touristes pour qu'il nous ramène à l'entrée du parc national où nous avons laissé Yakari. Nous devons ressembler à des naufragés car on nous offre à manger. Les passagers s'enthousiasment de notre aventure, eux qui ne parcourent le parc que derrière une vitre pendant quelques heures. Vous avez dû en voir de la faune et de la flore ? Euh oui des moustiques et des champignons !

Après une bonne nuit réparatrice dans notre chaleureux van, nous reprenons la route vers le nord, au delà du 65è parallèle, où l'on espère voir des aurores boréales (nous n'en verrons pas). Nous filons sur les pas de Jack London vers des contrées qui ont fait rêver des générations d'aventuriers (Fairbanks, Dawson city) et d'autres aux noms moins évocateurs (Tok, Chicken, Mayo).

Sans vraiment le vouloir, nous allons au fil des kilomètres, retracer le chemin des pionniers américains venus chercher fortune et fuir la récession lors de grande ruée vers l'or du Klondike. C'est à l'été 1896 que tout a commencé. Dans le petit ruisseau de Bonanza, affluent du Yukon, quelques hommes tombent sur un trésor : un filon d'or exceptionnel. Le secret sera bien gardé pendant un an, jusqu'à ce que les premiers chanceux ne débarquent sur la côte ouest américaine les poches bourrées d'or. Aussitôt la rumeur enfle et des milliers d'hommes entreprennent le long voyage qui mène à Dawson City. La plupart de ces quelques 50.000 aventuriers emprunteront « la voie du pauvre ». Partant de Seattle en bateau, ils longeront la côte Canadienne et les fjords du sud-est de l'Alaska jusqu'à Skagway. De là ils gagneront par une marche longue et périlleuse les rives du Yukon où, sur des radeaux de fortune, ils rejoindront la foule de malheureux déjà affairés à fouiller les boues de la rivière Klondike. La plupart ont mis près d'un an pour compléter ce voyage, nous allons faire le même (en sens inverse) en quelques semaines.

Dawson city est la première ville sur notre route après la frontière Canadienne. Nous sommes dans le territoire du Yukon : 0,01 habitant/km2. La naissance de Dawson city a été comme l'histoire de la ruée vers l'or, aussi extraordinaire qu'éphémère. Pas même un point sur les cartes en 1896, on y comptait plus de 30.000 habitants deux ans plus tard (soit la plus grande ville de l'ouest Canadien au nord de Vancouver). Aujourd'hui ils ne sont plus que 2000 à y vivre à l'année. Coupé du monde pendant près de huit mois par un hiver glacial, la ville revit en été avec les jours qui rallongent et les touristes qui reviennent. La plupart des bâtiments sont d'époque ou ont été restaurés et on ressent encore une ambiance de far west en parcourant les rues poussiéreuses. Même sentiment dans les saloons, la patronne nous aboie dessus et le pianiste est mort, mais ici point de folklore.

Après cette charmante escale, un instant tenté de passer le cercle polaire en allant vers Inuvik, nous optons pour l'option la plus sage et nous dirigeons vers Whitehorse. La route est longue, assez monotone et les quelques villages (stations services) traversés sont peu accueillants. Toujours pas d'ours à l'horizon, mais le soir venu, au coin du feu, nous conversons avec des castors.

Nous décidons de rouler jusqu'à Skagway, avec dans un coin de la tête l'idée de rallier la Colombie Britannique en ferry, comme à la grande époque. La ville se situe au bout d'un fjord majestueux, surplombé par des glaciers. Le décor en impose et devait effrayer les aspirants chercheurs d'or qui s'y sont aventurés. Songez qu'il devait transporter jusqu'au fleuve au delà du col Chilkoot plus d'une tonne de vivres et de matériel nécessaire pour la suite du voyage vers Dawson city. Une marche de 60 kilomètres dans la montagne qui leur prenait donc des mois compte tenu des allers-retours.
A peine arrivés en ville, nous partons en quête d'informations sur les bateaux rejoignant Prince Ruppert. C'est déjà la fin de saison, il reste peu de ferry assurant la liaison. Le prochain et dernier part le jeudi 4 septembre au petit matin. Ce voyage maritime sur la trace des pionniers, nous emmènera dans des endroits inaccessibles autrement, et nous évitera un détour de 1600 kilomètres par la route. Peut être verrons nous des baleines, des orques ? A coup sûr des paysages magnifiques. Rendez-vous est prit.

Nous avons donc quatre jours devant nous pour visiter les environs. La ville a eu la même destinée que Dawson city, on y retrouve une architecture similaire et un certain parfum d'aventure. A ceci prêt que dans l'ancienne cité d'or, les bateaux de croisière ne débarquent pas 6000 touristes à l'heure. Nous trouvons un peu de calme du côté de l'ancien village de Dyea où nous prenons du repos. Bien au chaud dans notre van garé sur la plage, un bouquin entre les mains, les phoques de l'autre côté de la vitre. Nous ferons une rencontre insolite un soir où nous cuisinons du saumon au bord d'une rivière... Jonathan est un biologiste de l'université de Fairbanks, il recense les espèces de chauve-souris dans les environs. Il a besoin d'aide, nous voilà ses assistants pour une nuit de piégeage de batman.

Enfin il est l'heure. Notre ferry nous attend. Réveil en sursaut, l'excitation du départ. Les sacs sont bouclés : trois jours de vivres préparés la veille, paire de jumelles, tente et sac de couchage pour dormir sur le pont du bateau. Allez en route ! Contact. Rien. Lumière. Rien. La batterie est à plat ! Panique ! Nous partons en courant jusqu'à l'embarcadère informer l'équipage. Il est 4h00 du matin, personne pour nous aider, où sont ces foutus croisiéristes ?! Après quelques bidouilles à la frontale sous le capot, il faut se rendre à l'évidence. Nous allons rater le dernier ferry, nous sommes restés à Skagway cinq jours pour rien, nous allons peut être voir nous passer sous le nez 800 dollars de réservation, notre van est en panne et il n'y a pas de garagiste à moins de 150 kilomètres. C'est le drame !

La suite au prochain épisode.


On t'as vu quand même

Batman begins

Couchsurfing climb

Canard WC

Gros glaçon

En allant vers le Denali

Caribou... vu du bus

Hôtel 5*

Sous-bois du Denali

Le repos du guerrier

A l'affut

Traversée à sec

Une petite mousse?

Into the wild

Vue du soir

Premier orignal!

Traversée glacée

Justine et Yakari

Polonaise aux fourneaux

Jeu de mirroir

Chicken : 20 habitants!

Code de la route à Dawson

Spécialité du saloon : cocktail à l'orteil

Une pensée pour les pionniers

Spot du soir

Le soleil vient de se lever...

Forêt de la comté

Skagway... à bientôt